C’est un véritable choc lorsque le verdict tombe : on a diagnostiqué un PPID chez votre cheval. Il s’agit d’une maladie neurologique qui entraîne un déséquilibre hormonal majeur. Les problèmes auxquels il est confronté ou qu’il peut encore rencontrer ne sont pas des moindres. Le vétérinaire commence alors à parler d’hormones synthétiques comme traitement.
Beaucoup de propriétaires de chevaux sont très inquiets à l’idée d’un tel traitement. Si l’on en croit les messages postés sur les réseaux sociaux, ce médicament ne peut que susciter des problèmes. Heureusement, une alternative à base de plantes existe. La question qui se pose maintenant est : le pergolide ou le gattilier pour le PPID ? Mais est-ce vraiment si noir ou si blanc ?
Le cachet
Tout d’abord, voyons ce qu’est le médicament. Il s’agit de la molécule pergolide, commercialisée sous plusieurs marques (Prascend®, Pergoquin®, Pergolife®, Pergosafe®). Le pergolide est un agoniste de la dopamine, c’est-à-dire d’une substance qui remplace l’hormone dopamine dont la production est insuffisante chez les chevaux atteints de PPID. La dopamine inhibe la production d’hormones dans l’hypophyse. La partie de l’hypophyse – aussi appelée glande pituitaire – où les choses se gâtent en cas de PPID s’appelle le lobe intermédiaire.
Frein d’urgence
Trop peu de dopamine signifie donc trop peu d’inhibition du lobe intermédiaire. Il en résulte une surproduction de certaines hormones hypophysaires (les mélanocortines, dont la plus connue est l’ACTH). Si la dopamine est la pédale de frein, le pergolide est le frein d’urgence. Ce frein d’urgence est important car une grande partie des problèmes dont souffre un cheval PPID sont dus à un excès de mélanocortines dans le sang.
Grossissement de l’hypophyse et adénomes
Il existe une autre raison pour laquelle il est important d’inhiber de manière synthétique l’hypophyse. Le déficit en dopamine est le résultat direct de la dégénérescence des nerfs reliant une partie du cerveau (l’hypoythalamus) à l’hypophyse (c’est pourquoi nous appelons le PPID une maladie neurologique).
La dégradation des nerfs est irréparable et irréversible. En conséquence, l’hypophyse est de moins en moins inhibée. Les cellules de l’hypophyse “pensent” maintenant qu’elles doivent produire de plus en plus d’hormones. Pour ce faire, elles grossissent (hypertrophie) et commencent à se multiplier (hyperplasie). L’hypophyse gonfle alors et commence à exercer une pression sur les tissus cérébraux et nerveux adjacents. Ce phénomène peut à son tour provoquer une série d’autres troubles, dont la cécité et des crises d’épilepsie. À terme, des tumeurs du tissu glandulaire (adénomes) peuvent également se former dans l’hypophyse.
Ça marche …
La baisse des taux d’ACTH peut être démontrée par des analyses de sang dès 12 heures après le début du traitement [1]. Chez 30 % des chevaux traités, les taux d’ACTH reviennent dans les valeurs normales après deux mois [2]. Chez 60 % d’autres chevaux, on observe également une diminution, bien qu’ils restent au-dessus de la limite supérieure. Le pergolide diminue donc les taux d’ACTH dans le sang dans la plupart des cas [3]. Dès que l’on arrête le traitement au pergolide, les taux d’ACTH augmentent à nouveau [4].
Tableau clinique
Environ 75 % des chevaux recevant du pergolide vont présenter une amélioration clinique dans les quatre à huit semaines. Le cheval devient plus vif et moins apathique. L’envie de travailler augmente à nouveau. Les problèmes de pelage (mue difficile, hypertrichose), la transpiration (hyperhidrose, hypohidrose), la consommation excessive d’eau (polydipsie) et les urines fréquentes (polyurie) diminuent. Le pergolide réduit l’hypertriglycéridémie (engraissement du sang) associée au SME. Le poids corporel s’améliore également [5].
… mais à quel prix ?
Bien qu’une étude de 2012 indique que es propriétaires de chevaux sont plutôt satisfaits à l’égard du pergolide et qu’une autre étude de 2019 conclut que le médicament est généralement bien toléré, il existe certains effets secondaires qu’il ne faut pas sous-estimer [6, 7]. Les propriétaires de chevaux débattent beaucoup de l’importance des effets secondaires dans la décision d’administrer du pergolide.
La qualité de vie vs. l’espérance de vie
Il n’y a pas de réponse unique à cette question. Le fait est que la maladie est progressive et irréversible. Par conséquent, si le médicament n’est pas administré, il est presque certain que la maladie s’aggravera. Cependant, chez certains chevaux, les effets secondaires sont si importants que cette situation n’est pas non plus acceptable. Le remède ne doit pas être pire que la maladie. Il faut parfois choisir entre la qualité de vie et l’espérance de vie.
Voile de pergolide
Le pergolide est difficile à doser avec précision. En cas de surdosage, un excès de dopamine synthétique se produit. Environ un cheval sur trois perd l’appétit (anorexie) ou devient apathique et terne, si on commence avec la dose recommandée ou si on augmente la dose [8]. C’est ce qu’on appelle le ‘voile de pergolide’. La diarrhée est constatée chez environ 30 % des chevaux. La notice d’utilisation ne mentionne pas l’agressivité en tant qu’effet secondaire. Néanmoins, elle est parfois observée par certains propriétaires de chevaux.
Redémarrer
Le voile de pergolide et la diarrhée peuvent généralement être résolus en arrêtant le médicament pendant deux ou trois jours, puis en recommençant avec la moitié de la dose. Ensuite, on augmente graduellement. Ne le faites qu’en concertation avec votre vétérinaire.
Mais il reste encore des chevaux pour lesquels cette astuce ne fonctionne pas et qui passent leurs jours dans le pré comme des zombies. Et en dehors de tout cela, il y a des propriétaires de chevaux qui ne veulent pas donner de substances pharmaceutiques à leurs chevaux pour des raisons de principe. Voilà que la petite plante arrive au coin de la rue.
La plante
La phytothérapie recommande le gattilier (ou: poivre des moines, Vitex Agnus Castus) comme alternative au pergolide. Cette plante contient des substances actives dont l’action est similaire à celle de la dopamine. Des études montrent des effets positifs sur les problèmes de pelage, de transpiration, la polyurie et la polydipsie [9]. La réduction des dépôts de graisse (adiposité) et la diminution de l’apathie sont également rapportées [10]. D’autres études concluent à l’inexistence de ces effets positifs. Il existe une étude qui montre que les signes cliniques ont empiré chez presque tous les chevaux étudiés [11].
Le gattilier et ACTH
Bien que l’amélioration de certains signes cliniques soit une bonne nouvelle, il n’a pas encore été prouvé que le gattilier réduisait les taux d’ACTH dans le sang des chevaux atteints de PPID [12]. Une étude (non publiée) a montré que 12 chevaux sur 25 présentaient des taux d’ACTH inférieurs, mais que l’ACTH augmentait chez neuf autres [13].
Pourquoi ça ne marche pas ?
Nous ne savons pas encore pourquoi le gattilier n’a pas l’effet escompté. En fait, on s’y attendrait en sachant que les rats y réagissent efficacement, bien qu’il s’agisse d’une autre partie de l’hypophyse (le lobe antérieur, qui ne joue qu’un rôle minime dans le PPID) [14]. Il se pourrait que les cellules nerveuses du lobe intermédiaire de l’hypophyse de cheval soient moins sensibles aux substances actives que celles du lobe antérieur. Cela n’a d’ailleurs pas encore été démontré.
En ce qui concerne le lobe antérieur, nous savons, grâce à la médecine humaine, que le gattilier a un effet inhibiteur (donc freinant !) sur la dopamine à faible dose, alors qu’il n’a pas d’effet à forte dose [15]. Nous ne savons pas encore si c’est également le cas chez les chevaux et si cet effet hautement indésirable pour les chevaux atteints de PPID se produit également au niveau du lobe intermédiaire de l’hypophyse
Thérapie de soutien
Comme le pergolide réduit le taux d’ACTH et que le gattilier n’y parvient pas, la plante n’est pas une alternative au comprimé. D’après les expériences positives rapportées par les propriétaires de chevaux en ce qui concerne le tableau clinique, il peut être intéressant de l’utiliser comme thérapie de soutien. Mais si vous l’utilisez à la place du pergolide, vous prenez le réel risque de ne pas donner à votre cheval le traitement dont il a besoin.
Et les deux ensemble ?
À noter que l’on en sait encore moins sur l’utilisation combinée du gattilier et du pergolide. Il n’est donc pas possible de savoir si cela sera bon, neutre ou mauvais pour votre cheval. Chez les personnes atteintes de la maladie de Parkinson (une maladie similaire au PPID à certains égards), il est déconseillé d’associer le gattilier à un agoniste de la dopamine. Par mesure de précaution, informez toujours votre vétérinaire si vous souhaitez administrer du gattilier en même temps que du pergolide. Surveillez de près les valeurs sanguines et les évolutions du tableau clinique.
Mais si l’ACTH diminue quand même ?
Chez certains chevaux, les taux d’ACTH diminuent lorsqu’ils sont traités avec du gattileir. Alors, comment cela se fait-il ? Commençons par dire honnêtement qu’il y a peut-être encore trop peu de recherches sur cette petite plante. Les recherches qui ont été effectuées concernent la médecine humaine, des maladies neurodégénératives autres que les PPID, ou ont été menées sur des rats et elles ont constaté des effets que sur les hormones provenant du lobe antérieur de l’hypophyse.
Malheureusement, ces recherches ne sont pas très utiles dans le cas du PPID. Il n’y a que quelques millimètres d’écart, mais chez le cheval atteint de PPID, c’est le lobe intermédiaire qui est concerné. On ne peut donc pas exclure à l’avance que le gattilier, malgré l’absence de preuves scientifiques, fasse ce que l’on voudrait qu’il fasse. L’absence de preuves n’est pas synonyme d’absence d’efficacité.
Stress et douleur
La production d’ACTH peut être affectée par un certain nombre de facteurs sans rapport avec le PPID. Par exemple, le stress et la douleur font augmenter l’ACTH. Étant donné que le gattilier améliore le tableau clinique et réduit ainsi le stress et la douleur, cela pourrait entraîner une baisse des taux d’ACTH. En outre, le gattilier a déjà des effets anti-douleurs [16]. La plante pourrait donc indirectement améliorer les taux sanguins.
Alors, on baisse la dose ?
Il est tentant de réduire la dose de pergolide ou même d’arrêter le médicament sur cette base. Malheureusement, l’ACTH qui diminue suite à une réduction du stress et de la douleur provient du lobe antérieur de l’hypophyse. Moins de pergolide signifie alors moins d’inhibition du lobe intermédiaire et donc une surproduction de mélanocortines, un grossissement de l’hypophyse et la formation d’adénomes.
Le phénomène des niveaux élevés d’ACTH provenant du lobe antérieur est parfois appelé pseudo-PPID ou pseudo-Cushing sur les réseaux sociaux ; des termes qui créent pas mal de confusion au lieu de donner une explication. Pour ne pas dire des termes à éviter.
Retarder l’utilisation du pergolide
Certains propriétaires de chevaux utilisent la phytothérapie pour retarder l’utilisation du médicament. Ils ne commencent à utiliser le pergolide que lorsqu’ils ne réussissent plus à supprimer les signes cliniques avec les remèdes naturels. En général, une dose plus élevée est alors nécessaire que si le traitement est commencé tout de suite après le diagnostic. Il faut également plus de temps pour normaliser les taux d’ACTH [17]. Sans qu’on s’en aperçoive, la dégradation de l’hypophyse s’est aggravé probablement aussi. Il n’y aura aucun moyen de revenir en arrière.
Alors ? Pergolide ou gattilier ?
Bien entendu, chacun doit décider pour lui-même et pour son cheval quels remèdes utiliser dans la lutte contre cette maladie compliquée et pénible qu’est le PPID. L’objectif de cet article n’est donc pas de vous pousser dans une direction particulière. Il vise simplement à clarifier l’idée confuse selon laquelle le comprimé et la plante seraient deux variantes d’un même traitement.
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Mes livres ont évidemment été traduits par des traducteurs très professionnels. En revanche, j’ai traduit cet article moi-même. Le français n’est pas ma langue maternelle. Du coup, si vous repérez une erreur étrange dans le texte, veuillez m’en informer en laissant un commentaire ci-dessous. Merci.